Q&A – L’adaptation de la procédure contentieuse devant les juridictions administratives durant la crise sanitaire

22/05/20
Q&A – L’adaptation de la procédure contentieuse devant les juridictions administratives durant la crise sanitaire

L’épidémie de COVID-19 soulève de nombreuses questions quant à l’application des délais de recours et de procédures devant les juridictions administratives. Le fonctionnement de ces juridictions, fortement perturbé durant la période de crise sanitaire, a dû s’adapter.

 

Les ordonnances suivantes permettent de reporter certains délais et d’adapter le fonctionnement des juridictions administratives à la crise sanitaire :

  • L’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif modifiée par l’ordonnance n°2020-558 du 13 mai 2020 ;
  • L’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période modifiée par l’ordonnance n°2020-560 du 13 mai 2020.

 

Depuis le 11 mai, certaines juridictions annoncent reprendre leur activité. C’est le cas du Tribunal administratif de Paris qui a annoncé reprendre son activité à compter du 11 mai et tenir à nouveau des audiences pour l’ensemble des contentieux.

 

Rappel sur les principales règles applicables au contentieux administratif durant cette période :

 

Vous redoutez un recours contre une autorisation qui vous a été délivrée ou vous souhaitez introduire un recours contre une autorisation administrative ?

 

Principe : Les délais de recours expirant entre le 12 mars et le 23 juin 2020 recommencent à courir à compter du 23 juin 2020, dans la limite de deux mois. Il existe néanmoins des exceptions à ce report des délais de recours pour certains contentieux (contentieux électoral notamment concernant les élections municipales et contentieux des étrangers).

 

L’exception en matière d’urbanisme : Il existe des règles particulières concernant les délais de recours contre les autorisations d’urbanisme (PC/DP) :

  • Les délais de recours n’ont pas expiré avant le 12 mars 2020 : suspension des délais de recours qui recommenceront à courir à compter du 24 mai pour la durée non encore écoulée avant le 12 mars. Si la durée restante est inférieure à 7 jours, le délai de recours recommencera à courir le 24 mai pour une durée de sept jours.
  • Les délais de recours qui auraient dû commencer à courir entre le 12 mars et 23 mai 2020 : report de ces délais à compter du 23 mai 2020.
Exemple : si votre permis de construire a été régulièrement affiché sur le site à compter du 10 février 2020, le délai de recours contre ce permis de construire expirait en principe le 11 avril 2020. En réalité, il sera considéré comme suspendu au 12 mars et reprendra au 24 mai pour 30 jours.

 

 

Vous devez déposer un mémoire en réplique ou un mémoire complémentaire ?

Le report du délai originellement imparti va varier, selon qu’il s’agisse d’un délai imposé par un texte de loi ou par une mesure d’instruction édictée par un juge.

 

  • Les délais impartis aux parties par un texte pour produire un mémoire ou une pièce et expirant entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 recommencent à courir à compter du 23 juin 2020 pour leur durée initiale, dans la limite de deux mois[1].

 

Exemple : selon l’article R. 600-5 du Code de l’urbanisme, en matière de contentieux contre les autorisations d’urbanisme (tels que les permis de construire), les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. En application des règles dérogatoires posées par l’ordonnance n°2020-306, en cas de communication aux parties du premier mémoire en défense le 20 janvier 2020, les parties auront jusqu’au 23 août 2020 pour produire de nouveaux moyens.

 

 

Les mesures d’instruction dont le terme vient à échéance entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 sont prorogées de plein droit jusqu’au 24 août 2020 inclus[2].

 

Toutefois, lorsque l’urgence ou l’état de l’affaire le justifie, le juge peut fixer un délai plus bref.

 

Sont notamment concernés les délais fixés aux parties par la juridiction pour régulariser une requête, confirmer une requête ou produire une pièce ou un mémoire.

 

Exemple : si le juge en charge de l’instruction a sollicité de votre part la communication d’une pièce dans un délai de deux mois à compter du 20 janvier 2020, ce délai expirera désormais le 24 août 2020.

 

La clôture d’instruction de votre dossier devait intervenir lors de la période d’état d’urgence sanitaire ?

 

Les mesures de clôture d’instruction dont le terme vient à échéance entre le 12 mars 2020 et le 23 mai 2020 inclus sont prorogées de plein droit jusqu’au 23 juin 2020 inclus, à moins que ce terme ne soit reporté par le juge.

 

 

Le juge a besoin d’échanger avec vous ?

 

En principe, les juridictions administratives échangent avec les parties via la plateforme Télérecours et ce moyen reste privilégié si vous avez un avocat. Les juridictions ont la possibilité durant la crise sanitaire d’utiliser d’autres moyens de communication (e-mails, fax, voie postale…). La communication des pièces, actes et avis aux parties peut être effectuée par tout moyen.

 

 

Vous attendiez un jugement ou une audience ?

 

Lorsque les délais impartis au juge pour statuer courent ou ont couru en tout ou partie entre le 12 mars 2020 et le 23 mai 2020 inclus, leur point de départ est reporté au 1er juillet 2020.

 

Le fonctionnement des audiences peut être aménagé :

  • Le président de la formation de jugement peut décider que l’audience aura lieu hors la présence du public ou que le nombre de personnes admises à l’audience sera limité.
  • Les juges administratifs peuvent désormais organiser des audiences dématérialisées par un moyen de communication audiovisuelle ou téléphonique. La présence physique de l’avocat aux côtés de son client n’est pas requise ; il peut être entendu par téléphone.
  • Le président de la formation de jugement peut en outre dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.
  • Il est possible de statuer sans audience sur tous les référés après information des parties et fixation d’une date de clôture d’instruction.

 

 

Pour toute question sur ces sujets, vous pouvez contacter :

 

 

[1] Article 2 de l’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période

[2] Article 16 de l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif

Pour aller plus loin