Chiffres clés
Alors que plus de trois Français sur quatre achètent aujourd’hui leurs billets en ligne , la place croissante des plateformes de vente en ligne a favorisé le développement de la vente illicite de billets de seconde main. Sur les douze plateformes contrôlées par la DGCCRF en 2019, dix présentaient des anomalies et deux procès-verbaux ont été dressés. Si elle est difficilement mesurable en volume, certains estiment que la vente illicite représente aujourd’hui jusqu’à un billet sur quatre . Les victimes de cette pratique : les spectateurs qui payent jusqu’à 3 à 4 fois plus cher leur billet – parfois invalide – mais aussi les organisateurs d’évènements sportifs (les fédérations sportives nationales et internationales) ou culturels, qui subissent une atteinte à leur image et à leur politique relevant souvent d’une mission de service public compte tenu de la spéculation générée par ces reventes illicites.
De Gaulle Fleurance a analysé plus de 32 décisions de justice rendues entre 2008 et 2022 portant sur la revente illicite de billets dans le secteur sportif.
UN CONTENTIEUX QUI EXPLOSE
La revente illicite de billets constitue un manquement sanctionné sur le fondement de l’article L. 333-1 du Code du sport, selon lequel « Les fédérations sportives (…) sont propriétaires du droit d’exploitation des manifestations ou compétitions sportives qu’ils organisent ». La sanction de cette pratique s’est durcie avec la loi du 12 mars 2012 qui a fait de la revente de billets de manière habituelle, sans l’autorisation de l’organisateur, un délit sanctionné sur le fondement de l’article L. 313-6-2 du Code pénal.
Le contentieux s’est considérablement accru, le nombre de décisions ayant été multiplié par 2,5 entre 2008-2010 (4) et 2020-2022 (10). « L’accélération s’observe surtout depuis 2016 et le Championnat d’Europe de Football qui se tenait à Paris », remarquent Smaïn Guennad, Serge Lederman et Jean-François Vilotte, avocats chez De Gaulle Fleurance.
UN TAUX DE SUCCES DE PRESQUE 90%
« Les Fédérations sportives nationales et internationales, qui subissent particulièrement cet accroissement de la revente illicite, sont de plus en plus vigilantes et n’hésitent plus à faire valoir leurs droits devant les juridictions », observent Smaïn Guennad, Serge Lederman et Jean-François Vilotte. « Et elles ont raison, car le taux de succès de leurs demandes judiciaires atteint quasiment les 90 % ».
DES DOMMAGES-INTERETS ALLOUES CROISSANTS
Autre enseignement : les dommages et intérêts versés ont littéralement explosé entre 2014-2016 et 2017-2019, passant respectivement de 130 000 euros à 1 635 000 euros au total, soit presque 13 fois plus, avant de diminuer les années suivantes. Et derrière cette moyenne, se cachent des écarts très importants : les dommages et intérêts peuvent atteindre plus de 800 000 euros, lorsqu’il s’agit de réparer le préjudice subi par un organisateur d’évènements importants tel que l’UEFA.
« A l’aune de l’organisation en France de deux évènements sportifs d’importance majeure, la tendance devrait augmenter significativement », anticipent Smaïn Guennad, Serge Lederman et Jean-François Vilotte. « D’autant que la jurisprudence se durcit : le juge a récemment retenu la responsabilité d’une plateforme de revente qui, pour tenter de contourner le droit Français, avait mis en place une mesure de géo-blocking, empêchant les internautes français d’acquérir des billets pour un évènement français ».