Réforme du prix de référence

18/01/22
Réforme du prix de référence

« Retour vers le passé » pour le régime des annonces de réduction de prix

 

L’ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021 transposant la Directive 2019/2161 du 27 novembre 2019 relative à une meilleure application et une modernisation des règles de l’Union en matière de protection des consommateurs a récemment modifié différentes dispositions du droit de la consommation.

 

En particulier, elle vient modifier, six ans après l’arrêté du 11 mars 2015 relatif aux annonces de réduction de prix à l’égard du consommateur, la définition de prix de référence … pour revenir au régime antérieur qui définissait le prix de référence comme le prix le plus bas pratiqué au cours des trente derniers jours.

 

Ces nouvelles dispositions s’appliqueront à compter du 28 mai 2022.

 

1. Le régime en vigueur jusqu’au 28 mai 2022 : la liberté dans la détermination du prix de référence

Le régime juridique des annonces de réduction de prix a fait l’objet d’évolutions du fait des règles de droit de l’Union européenne.

 

Préalablement à l’arrêté du 11 mars 2015 précité, les annonces de réduction de prix devaient se conformer à l’arrêté du 31 décembre 2008 relatif aux annonces de réduction de prix à l’égard du consommateur. Sous l’empire de cet arrêté, toute annonce de réduction de prix devait être réalisée par rapport à un prix de référence défini comme :

  • Soit le prix le plus bas effectivement pratiqué par l’annonceur pour un article ou une prestation similaire au cours des trente derniers jours précédant le début de la publicité.
  • Soit le prix conseillé par le fabriquant ou l’importateur du produit ou le prix maximum résultant d’une disposition de la réglementation économique.

 

Cet arrêté avait été jugé contraire au droit européen, en particulier par rapport à la directive 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales déloyales (voir RLDA, 1er juin 2015, T. Titone, M. Dary, Annonces de réduction de prix : nouveau régime et opportunités pour les professionnels).

 

L’arrêté du 11 mars 2015 est venu mettre en conformité au droit européen le régime des annonces de réduction de prix.

 

Aux termes de cet arrêté, le prix de référence est simplement défini comme celui « déterminé par l’annonceur et à partir duquel la réduction de prix est annoncée » (art. 3, arrêté du 11 mars 2015).

 

Cette définition ouvre, pour les opérateurs économiques, le champ des possibles, la seule contrainte étant que l’annonceur soit en capacité de justifier la réalité de ce prix de référence (article 4, arrêté du 11 mars 2015).

 

Les professionnels ont d’ailleurs été imaginatifs dans le choix de leur prix de référence : prix couramment pratiqués, prix constatés auprès d’autres enseignes, prix conseillés, prix à une date déterminée, prix moyens de vente, prix de début de saison ou de collection, etc…

 

Cet assouplissement ne laisse pas toute liberté aux opérateurs économiques, qui doivent s’assurer que leurs opérations promotionnelles ne sont pas constitutives de pratiques commerciales déloyales au sens de l’article L. 121-1 du code la consommation ou de pratiques commerciales trompeuses au sens de l’article L. 121-2 du même code.

 

La Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) a d’ailleurs opéré de nombreux contrôles à ce titre, notamment dans le secteur du ecommerce. Elle avait ainsi constaté en 2015 un taux de non-conformité de près de 20% – non-conformité ayant conduit à la conclusion de transactions pour un montant global supérieur à 2 M€ et des modifications de comportements des entreprises du secteur.

 

2. Le nouveau régime applicable après le 28 mai 2022 : une promotion encadrée

La liberté dans la détermination du prix de référence conduisait néanmoins à des incertitudes pour les professionnels et empêchait une interprétation harmonisée de la réglementation relative aux annonces de réduction de prix dans les différents Etat membres.

L’ordonnance du 22 décembre 2021 introduit un nouvel article L.112-1-1 dans le Code de la consommation en reprenant l’ancienne définition du prix de référence.

Le nouvel article L. 112-1-1 du Code de la consommation dispose que le prix de référence devra correspondre au prix le plus bas pratiqué à l’égard de tous les consommateurs au cours des trente derniers jours précédant la réduction.

 

Quelques dérogations sont prévues, notamment pour les produits périssables menacés d’une altération rapide, en cas de comparaison avec les prix d’un concurrent et en cas de de réductions successibles pendant une période déterminée, ou aux prix réduits en application de programmes de fidélités ou de bons d’achat.

 

En cas de manquement, la pratique pourra être considérée comme une pratique commerciale trompeuse au sens de l’article L. 121-2 du Code de la consommation et sanctionnée d’un an d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende pour une personne physique et 1.500.000 euros pour une personne morale en vertu de l’article L. 132-2 du même code. Le montant de l’amende peut être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du délit, à 10 % du chiffre d’affaires moyen annuel, calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits, ou à 50 % des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité ou de la pratique constituant ce délit.

 

En pratique, cette nouvelle définition est susceptible de modifier considérablement la politique promotionnelle de certains opérateurs économiques sur leurs points de vente et sur internet.

 

Dans le cadre de leurs annonces de réductions de prix, certains opérateurs continuaient de se prévaloir du prix le plus bas au cours des trente derniers jours comme prix de référence. Cette réforme n’aura dès lors aucune incidence sur les pratiques de ces derniers.

 

Pour les autres, il conviendra de rétablir leur politique promotionnelle en place jusqu’à l’adoption de l’arrêté du 11 mars 2015, étant précisé que certaines exceptions ont disparu.

 

Le retour à ce mode de détermination du prix de référence conduira notamment à espacer les offres promotionnelles d’un mois pour établir un prix de référence avant de procéder de nouveau à une offre commerciale.

 

Une vigilance accrue devra avoir lieu pendant les périodes qui précèdent les soldes ou les opérations promotionnelles (Black Friday, French Days) afin de tenir compte dans les annonces de réduction de prix des offres promotionnelles qui avaient été accordées les jours avant ces opérations.

 

Par ailleurs, formellement, il sera important pour les opérateurs économiques de conserver une preuve du prix de référence puisqu’ils seront amenés, en cas de contrôle de l’administration ou de contestations de consommateurs, à démontrer la réalité du prix fondant leur réduction. La preuve pourra être une note, un bordereau, un bon de commande, un ticket de caisse ou tout autre document permettant de rapporter la preuve de la réalité du prix.

 

 

Les avocats de la société De Gaulle Fleurance et Associés restent mobilisés pour vous accompagner dans la mise en œuvre de vos opérations promotionnelles, ou pour vous assister en cas de contrôle de la DGCCRF.

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