Covid-19 : Vers un assouplissement in vivo de la chronologie des médias

27/03/20
Covid-19 : Vers un assouplissement in vivo de la chronologie des médias

L’article 17 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid‑19, publiée au Journal officiel du 24 mars, met en place « un régime exceptionnel » d’assouplissement de la chronologie des médias.

 

La loi d’urgence permet au président du Centre national de la cinématographie et de l’image animée (CNC) d’accorder, pour les films qui faisaient l’objet d’une exploitation en salles au 14 mars 2020, c’est-à-dire la veille de la fermeture de l’ensemble des salles françaises, une dérogation au délai « officiel » de quatre mois pour pouvoir être exploités sous forme de VOD ou de DVD/Blu-Ray. Cela constitue un aménagement sans précédent des dispositions de l’article L.231-1 du Code du Cinéma et de l’Image Animée, codifiant les termes de l’accord pour le réaménagement de la chronologie des médias du 6 septembre 2018 et son avenant du 21 décembre 2018.

 

Cette dérogation à titre exceptionnel aux règles de chronologie des médias pour les sorties cinéma du 14 mars permettant une mise à disposition plus rapide des films constitue à la fois un test bienvenu et une mesure suscitant l’inquiétude des exploitants.

Un aménagement permettant aux plateformes de SVOD de s’inscrire dans l’économie du financement des contenus est souhaité par certains acteurs qui trouvent inapproprié de devoir attendre 24 mois après la sortie en salle d’un film de cinéma dont ils auraient contribué au préfinancement.

 

Les exploitants traditionnels sont opposés à tout aménagement et l’ont rappelé au Ministre de la Culture, sous la plume du président de la Fédération nationale des cinémas français, en jugeant « le caractère d’urgence et indispensable à la vie de la nation de cette mesure […] absolument pas avérée » tout en rappelant son « opposition à priver sans aucune concertation les professionnels de la maîtrise d’un tel dispositif et à modifier le code du cinéma unilatéralement ».

 

Pourtant, le texte instaure une mesure exceptionnelle et temporaire qui permettra au CNC d’examiner au cas par cas, film par film, sous certaines conditions, les demandes d’exploitation VOD présentées par les distributeurs, cessionnaires des droits d’exploitation salle et vidéo.

 

La décision appartiendra au Président du CNC et devra tenir compte d’une part de la difficulté d’une nouvelle sortie des seuls films sur les écrans le jour de la fermeture des salles le 15 mars 2020, annoncée à l’été prochain alors que d’autres films sont programmés et d’autre part de la nécessité de permettre le maintien de recettes d’exploitation venant rémunérer distributeurs, producteurs et talents.

 

D’un coup, ces films ne sont plus soumis à la chronologie des médias et vont donc connaitre un autre stade de leur exploitation, avant la reprise sur les antennes des diffuseurs qui les ont préfinancés. Cela devrait permettre de mesurer in vivo les conditions dans lesquels les titulaires des droits d’exploitation des films pourront bénéficier d’une exploitation optimum sur tous supports dans le cadre de la chaine des contrats conclus pour le financement du film.

 

Afin que la mesure s’applique sans effet pervers, le CNC a confirmé que les fonds mobilisés dans le cadre du soutien financier automatique ou sélectif du cinéma ne seraient pas remboursés par les producteurs, la condition de leur octroi étant la sortie en salle de l’œuvre cinématographique. A cet égard, on doit s’attendre à une annonce similaire de Bercy sur le maintien du bénéfice du crédit d’impôt investi dans chaque production concernée.

 

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